« Mon travail est multifacette »

Gérard Pigeon dans son atelier de Sartilly (Manche), en 2017
Dans l'atelier, avec une de ses boîtes, en 2017 © Valérie Magneron

Entrevue avec Gérard Pigeon en août 2014, réalisée dans son atelier de Sartilly, en Normandie.

 

Peux-tu nous parler de ton travail et des sujets que tu traites actuellement ?

G.P. Je qualifie mon travail de travail multifacette. Je ne questionne pas particulièrement la société, c’est avant tout un délassement et un besoin de transmission. Toute mon œuvre, notamment les boîtes, est un témoignage de l’activité et de l’atrocité humaine.

 

Depuis combien de temps crées-tu des boîtes ?

G.P. J’ai fabriqué ma première boîte en 1973 sous l’influence de Louise Nevelson, une sculptrice américaine. Ces boîtes sont des dénonciations des méfaits de la société : souillures du littoral par les pétroliers, atrocités des guerres, barbarie banalisée, enfer des conditions de travail dans certains pays, menaces sur les droits de l’homme, tout ce qui asservit l’homme face au pouvoir, quel qu’il soit. Plus intimement, la solitude de l’individu dans ce monde sans espoir.

Quant à l’œuvre picturale, diverses périodes ont engendré figuration et abstraction en grande partie influencées par la mer, l’espace, les sables d’un lieu mythique, le Mont-Saint-Michel.

Peindre reste un échange mystérieux entre ce que l’on voit, l’on ressent et la volonté d’en transcrire au moyen de signes, formes et couleurs, la magie d’une empreinte émotionnelle. C’est un pari hasardeux mais tellement heureux.

 

L’actualité est une source d’inspiration pour toi. As-tu une exposition en préparation ?

G.P. Effectivement toutes les horreurs de l’actualité, qui ressurgissent même du passé, sont des thèmes que j’explore. Je prépare actuellement une exposition sur la guerre 1914-1918 dont sera fêté le centenaire cette année.

 

Estimes-tu important de fédérer d’autres artistes autour de thèmes aussi douloureux ?

G.P. C’est indispensable ! Les générations futures ne doivent pas oublier les horreurs passées. Notre devoir d’artistes est aussi de s’inscrire dans le savoir et la transmission afin d’éviter au maximum de nouveaux carnages. C’est pour cela que d’autres créateurs m’ont rejoint pour travailler sur cette exposition qui est un véritable travail de mémoire.

 

Après soixante ans de peinture et des centaines d’œuvres, quel avenir souhaites-tu pour tous ces travaux ?

G.P. Tout cela finira entre les mains de mes enfants, probablement… et de quelques amateurs complices.

Propos recueillis par Corinne Lafosse